Par @chroniquesessentielles et @sandra_etcaetera
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10h30 un samedi matin, la bête est matinale, elle est bien là, tout près de nous et surtout tout près d’Andréa Donaera son créateur, de Lise Caillat sa traductrice et de Laurence Bourgeon, son éditrice.
Andrea Donnera, universitaire à Bologne, a d’abord écrit de la poésie et des essais avant de s’attacher à l’écriture de ce roman qui a été au départ une pièce de théâtre. Je suis la bête est donc un premier roman tout droit sorti des Pouilles, région natale d’Andrea Donnera. Il commencera son écriture dès le premier soir de son arrivée à Bologne, comme si le fait d’avoir quitté Gallipoli lui avait permis de prendre le recul nécessaire pour entrer dans le récit de la terre mafieuse de son enfance•••
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Un premier roman, et quel roman ! Entre poésie et obscurité, à la fois inspiré par la tragédie grecque et la mafia locale, il réussit à raconter un drame familial de l’intérieur, dans un univers tissé d’histoires nourrissant une puissante mythologie autour de la Sacra Corona Unita. Moins connue que la mafia napolitaine, ne vous y méprenez pas, elle sème pourtant tout autant la terreur, notamment en enfermant ses victimes. Dans le roman, Mimi (chef de la Sacra Corona Unita) a perdu son fils Michele et tente de trouver un coupable au suicide du jeune homme•••
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Andrea nous confie alors qu’il s’est inspiré des figures réelles issues de cette mafia, qu’il a même dîné avec un de ces hommes qui l’avait simplement prévenu sur un point: « si tu ne donnes pas de nom, ça va ». On comprend pourquoi le roman a fait parlé de lui en Italie !
Tous les personnages de Je suis la bête sont donc à mi-chemin entre réalité et fiction – y compris Michele, personnage inspiré de sa propre adolescence. Ils ont tous une psychologie fouillée et complexe, mais aussi une voix et une façon de s’exprimer singulières•••
Je suis la bête, est un roman polyphonique fort dont les droits ont été achetés en décembre dernier par la Maison Cambourakis, y opérant un merveilleux travail sur la couverture : on peut y voir une main, la main de Mimi, cette main qui signifie toute l’emprise qu’il a sur les autres personnages. Lise Caillat, a quant à elle fait un magnifique travail de traduction.
Ce récit est aussi beau que violent, porté par l’écriture saisissante et puissante d’Andrea Donaera, entre poésie en prose et prose poétique. Son attachement à la poésie est d’ailleurs sans faille et il n’envisage pas son écriture autrement que sous le prisme de la musicalité des mots, illustrant cette passion pendant notre rencontre par l’analyse rythmique de la première phrase du roman, un hendécasyllabe (vers de 11 pieds), une longueur de vers très italienne: “Et Mimi pense qu’il va les tuer tous ».
Nous avons eu l’immense chance d’entendre cette poésie récitée lors d’une double lecture en italien puis en français de l’Incipit de Je suis la bête. Un moment hors du temps, comme une incantation.
Andrea Donnera a d’ores et déjà écrit un second roman (pas encore édité) : une sorte de 2e saison de ce premier roman pour l’auteur qui souhaite construire une trilogie autour de thèmes communs. Affaire à suivre !
A VOIR: le replay de la rencontre est disponible sur la chaîne YouTube
A LIRE: deux chroniques sur le roman d’ Andrea Donaera, ici et ici